A) L'opposion de la culture hippie : dans la sphère publique


 
 « Le fait de changer le mode de vie et l'apparence de la jeunesse du monde entier ne s'est pas fait par hasard, nous avons décidé de le faire, nous savions ce que nous faisions. »

John Lennon, 1972

La société de consommation 

Après avoir connu la seconde guerre mondiale, la société des années 50 dans laquelle grandiront les futurs hippies, entre doucement dans l’ère capitaliste. Cette nouvelle société est basée sur la propriété privée des moyens de production et l'accumulation du capital : les nouvelles entreprises réinvestissent en permanence une partie des profits accumulés, c'est-à-dire les recettes de l'entreprise qui ne sont pas utilisées pour acheter les produits de consommation intermédiaires (matières premières, énergie...) ou pour rémunérer les salariés, afin de développer les moyens de production et les profits futurs. 


La recherche de la productivité maximale qui caractérise ce système donne naissance à une toute nouvelle organisation du travail. La croissance du Fordisme entraîne une politique de hauts salaires, baisse les coûts de production permettant ainsi une baisse des prix. La société de consommation est lancée. Les premiers supermarchés « libre-service » inventés aux États-Unis en 1930 commencent à se répandre en Occident. « L’Express marché Goulet-Turpin » à Sainte Geneviève des bois, en région parisienne ouvre en 1948. Suivis de l’hypermarché en 1963. 


Les enfants des années 40, désormais parents, gardent le souvenir d’une enfance difficile et très modeste. Ils n’ont pas connu le luxe. Très rares sont ceux qui ont pu profiter d' une salle de bain ou même connaître l'eau courante. Tout était rationné, de la nourriture au bois, en passant par les vêtements. Ces derniers étant d’ailleurs très simples par manque de moyens et surtout à cause de la pénurie de tissus et de cuir. Soudainement, la possibilité d’accéder à un grand choix de produits divers et variés à des prix attractifs s'offre à cette génération. Le salon de l'automobile ainsi que celui de l'électroménager connaissent un franc succès. Les gens deviennent alors d’excellents consommateurs.


Salon de l'automobile en 1959 en France.


 "La consommation, comme nouveau mythe tribal, est devenue la morale de notre monde actuel. Elle est en train de détruire les bases de l'être humain, c'est-à-dire l'équilibre que la pensée européenne, depuis les Grecs, a maintenu entre les racines mythologiques et le monde du logos"
J.-P. Mayer, avant propos de La société de consommation 1970

Les hippies rejettent totalement ce nouveau mode de vie. Étant généralement issus des milieux aisés et bourgeois, ils sont énormément gâtés par leurs parents. Ces derniers les couvrent de bien matériels alors qu'eux ne pensent qu'à une chose : la liberté. Les adultes croient agir pour le bien de leurs enfants mais les jeunes eux, se sentent totalement opprimés.


 Les hippies cherchent à fuir par tous les moyens ce monde aux besoins superflus. Ils prônent un véritable «retour à la nature» La première valeur hippie est donc le naturel en opposition à la société actuelle basée sur l'apparence et le superficiel. L'état de nature, est la forme pure et essentielle que doit retrouver chaque chose une fois débarrassée des artifices de la société. 


Les Hippies recherchent l'état naturel dans tout ce qui touche à l'homme ou à son mode de vie. Pour cela, ils partent s'installer, seuls ou à plusieurs, dans les campagnes. Ils veulent retrouver leurs racines dans une nature qu'ils voient douce et sans contrainte. La plupart du temps, ils se heurtent à un monde paysan encore plus conservateur que celui des villes !



 
Ils tentent également de fuir la société occidentale en se tournant vers l'Orient. Ils sont attirés par l'exotisme, le culte de la spiritualité. Il y a une véritable volonté de découvrir les philosophies orientales comme le bouddhisme, le soufisme ou l'hindouisme mais aussi de vivre différemment. On recherche la paix intérieure et la maîtrise de soi. 


Gandhi, l'apôtre de la non-violence devient une idole. Les hippies reprennent également le style vestimentaire indien : tuniques à fleurs, sandales, bandeaux dans les cheveux etc.. mais aussi la musique.  Love you to de George Harrison marque l'arrivée de l'influence indienne dans la pop musique. De manière générale, les Hippies recherchent tout ce qui est en contradiction avec la culture de « l'Occident Chrétien »

Les Beatles avec Maharishi


"Faites l'amour, pas la guerre" 

Guerre froide, guerre de Corée, guerres coloniales, conflit israélo-arabe, génocide du Biafra... et maintenant guerre du Vietnam. Le monde évolue constamment dans un contexte de violence et de haine. La société de leurs parents a abouti à deux guerres mondiales, il est grand temps que cela s'arrête.

Les hippies sont engagés en politique, mais toujours de manière pacifiste. C'est principalement à l'occasion de la guerre du Vietnam que les hippies témoignent de leur refus de la violence. Les premières manifestations pacifistes ont lieu aux Etats-Unis en 1965. Par la suite de nombreuses marches sont organisées par des artistes beat et se finissent souvent en sit-in : on s'assoit pour opposer aux forces de l'ordre une résistance passive. Pour afficher leur appartenance aux mouvements de paix, les hippies portent le symbole désormais très célèbre peace and love en collier ou cousu sur leurs jeans.

 
Ce logo a été dessiné en 1958 pour la première marche antinucléaire d'Aldermaston en Angleterre.

De nombreux artistes ont aussi utilisé le thème de la paix dans leurs chansons. Par exemple John Lennon avec Give peace a chance, ou bien Imagine.
"Imagine all the people
Living life in peace..."
mais aussi Bob Dylan avec Blowin' in the wind :

Yes, 'n' how many times must the cannon balls fly
Before they're forever banned?”

Le premier grand festival de musique, Woodstock en 1969 marque l'apogée du mouvement hippie. Pendant 3 jours, des artistes comme Jimi Hendrix, Janis Joplin, Joe Cocker, The Who... défileront sans interruption sur la scène du festival. Woodstock, avec 500 000 participants, se déroule dans un climat de paix et d'amour.
 




La liberté d'expression 

La liberté d'expression dans les pays d'Europe comme la France ou l'Angleterre, est toute relative. Il existe peu de moyens de diffusion de l'information. La télévision en est à ses balbutiements (seulement une chaîne de télévision!), les radios n'ont pas encore été libérées. De plus, ces médias sont contrôlés par l'État. Pour écouter de la pop à la radio en France, il faut attendre 22h, le Pop Club de José Arthur, unique émission qui tienne compte de la révolution musicale étant diffusée à dessein en fin de soirée.

La mise en service des émetteurs d'ondes longues en 1965 permet plus facilement le développement de radios pirates qui diffusent à toute heure du jour et de la nuit, les chansons que la jeunesse adore et qui évoquent des sujets qui donneraient des frissons aux parents qui, de leur côté, écoutent Sylvie Vartan et Michel Sardou. 



Le film « Good morning England » (2009) montre à quel point il était difficile pour une radio de diffuser la musique qu'elle souhaitait.



Le psychédélisme

Le psychédélisme est la conséquence la plus importante qu'aura le mouvement hippie sur l'art. Ce néologisme est crée vers 1961 par l'Americain Timothy Leary. Cela signifie : ce qui exalte l'esprit.

Les créations psychédéliques sont conçues sous l'emprise du LSD ou tentent de reproduire les effets sensoriels de cette drogue et l'état délirant qu'elle provoque. Son esthétique est basée sur le principe de l'accumulation hétéroclite et désordonnée d'images, sans souci d'harmonie.

La musique psychédélique est une combinaison de pop rock (rythme binaire, instruments électrifiés, batterie) et de musique indienne (sitar et gamme exotique) à laquelle on fait subir des manipulations électroniques (synthétiseurs, effets de studio). On nomme aussi cette musique « acid rock » en référence au LSD ou bien « rock planant » pour qualifier l'état dans lequel plonge le LSD.



Les autres mouvements


Les blousons noirs.

Une partie de la jeunesse a facilement intégré la société de consommation. Ils s'approprient les mobylettes et les vestes en cuir. On les appelle les « blousons noirs ». Contrairement aux hippies, ces jeunes sont issus du milieu populaire. Ils prennent pour idole James Dean ou Johnny Hallyday pour les Français. Ils écoutent du rock and roll, une musique afro-américaine née pendant les années 40. Elvis Presley «  The King » est sans doute le nom le plus connu et le plus représentatif de ce courant musical et vestimentaire. 

Toutefois, il serait injuste de ne pas faire mention d'autres grands noms d'artistes comme Little Richard, Bill Haley, Buddy Holly et les Crickets ou encore Chuck Berry et Jerry Lee Lewis. Ils s'opposent également aux hippies par leurs valeurs, basées sur la violence. Ces jeunes sont considérés comme « des rebelles ». Ils sont connus pour leurs guerres de bandes, leur actes de délinquance ou de vandalisme envers les institutions... Ils créent un véritable mouvement d'opposition à la « bonne société américaine ».Ce sont les « voyous » de l'époque et ils font peur.

Les hippies sont principalement en rupture avec la culture dominante, mais ils s'opposent également à d'autres contre-cultures qui voient le jour dans les années 50.




Les pin-up

Du côté des femmes, l'apparition des pin-up fait scandale. En 1946, pour la première fois, le créateur Louis Réard intègre dans son défilé, une femme en bikini. Il n'en faut pas plus pour choquer la presse et créer un effet de bombe ! Cependant les parents restent indignés et ne se font pas vraiment de soucis. Il est impensable qu'une jeune fille « bien » puisse porter ce type de maillot. Ils seront réservés à certaines actrices hollywoodiennes qui à leurs yeux, seront forcement dévergondées. 


Les pin-up à la plastique parfaite comme Marilyn Monroe, Brigitte Bardot ou encore l'héroïne du dessin animé Betty Boop, font rêver les hommes avec des photos sexy, des tenues osées et des poses coquines. Même si elles essaient comme les hippies, d'ouvrir la société à une liberté sexuelle plus grande, ces dernières restent trop superficielles et pas assez naturelles.


Marylin Monroe, actrice